Renforcer les moyens de lutte contre la fraude fiscale

Promesse tenue

Promesse tenue de François Hollande

Les annonces post-Cahuzac

Le 10 avril 2013, dans une intervention télévisée consécutive à l'affaire Cahuzac, François Hollande a promis de lutter contre les paradis fiscaux, via trois mesures :

  • La transparence des banques : Les banques françaises devront "rendre publiques toutes leurs filiales partout dans le monde, pays par pays", et devront "publier la nature de leurs activités". Cette disposition figurait déjà dans la réforme bancaire, en voie d'adoption au Parlement.
  • La création d'un parquet financier à compétence nationale et d'un office national de lutte contre la fraude et la corruption
  • La défense, en Europe, de l'échange automatique d'informations fiscales, pour connaître "les revenus et le patrimoine détenus par les Français à l'étranger ou par des étrangers en France"

Les effectifs de lutte contre la fraude fiscale et le blanchiment devaient être renforcés: 50 enquêteurs de police judiciaire, 50 magistrats et 50 agents supplémentaires à la DGFiP (Direction générale des finances publiques) pour la lutte contre la fraude fiscale.

Le projet de loi sur la fraude fiscale

Promesse tenue de François HollandeLe projet de loi de lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière a été présenté en conseil des ministres le 24 avril 2013. Il prévoyait :

  • L'instauration d'une circonstance aggravante pour les fraudes les plus graves (fraude fiscale en bande organisée, comptes bancaires ou entités détenues à l’étranger), avec des peines allongées à 7 ans de prison et 2 millions d'euros d'amende.
  • Le recours aux techniques dites « spéciales » d’enquêtes (surveillance, infiltration ou garde à vue de quatre jours) pour traiter ces cas.
  • L'alignement des peines prévues pour les personnes morales sur celles applicables aux personnes physiques (ex : confiscation complète du patrimoine).
  • Le renforcement des capacités de contrôle de l’administration fiscale (recours à des preuves "illicites", saisie des avoirs) et l'ouverture de la faculté d’exercer les droits de la partie civile aux associations de lutte contre la corruption.

Les textes ont été définitivement adoptés le 5 novembre 2013.

Plusieurs dispositions – délai de prescription pour la fraude fiscale, exploitation des preuves, protection des lanceurs d'alerte et réduction de peine pour les "repentis fiscaux"– ont été ajoutées au projet de loi au cours du processus législatif.

Mais le 4 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a retoqué plusieurs mesures du texte: la garde à vue de 96 heures, l'amende calculée sur le chiffre d'affaires de la personne morale en cause, les visites à domicile des administrations fiscale et douanière, et l'élargissement de la liste des paradis fiscaux.

Les autres mesures

  • La création du parquet financier :

Promesse tenue de François Hollande

Voir la page consacrée à la promesse

  • Les recrutements :

Promesse en cours de réalisation de François Hollande

Les 50 agents supplémentaires de la DGFiP ont été recrutés comme prévu. Fin 2015, la Brigande nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), un service de la police judiciaire, comptait 40 membres. Au 3 mars 2016, le gouvernement parlait encore du recrutement "à terme, d'une cinquantaine de [...] magistrats et d'assistants spécialisés"
Le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), chargé des régularisations fiscales des "repentis, comptait en juin 2016 plus de 200 employés. À la fin de l'année 2016, le gouvernement n'avait donc pas encore atteint les objectifs (fixés par François Hollande) de recrutement d'enquêteurs de la police judiciaire et de magistrats
  • La liste des paradis fiscaux :

Promesse tenue de François Hollande

La mise à jour de la liste des territoires non coopératifs en matière fiscale, le 21 août 2013, y a fait entrer 3 paradis fiscaux notoires : les Bermudes, les Îles Vierges britanniques et Jersey. Les Philippines en sont sorties.

Fin 2016, la liste recensait 7 Etats et territoires non coopératifs en matière fiscale: le Botswana, le Brunei, le Guatemala, les Iles Marshall, Nauru, Niue et le Panama. 

  • L'échange automatique de données :

Promesse tenueCette question a été au centre des négociations du G8 de juin 2013, qui a appelé à en faire le nouveau standard mondial, puis du G20 de septembre, qui s'est engagé à le mettre en place à partir de la fin 2015.

Le 28 octobre 2014, 49 pays, dont la France représentée par Michel Sapin, ont officiellement signé un accord de passage à l’échange automatique de données fiscales sur les contribuables du monde entier (possession d’un compte bancaire à l’étranger, perception de revenus ou d’intérêts, achat de parts de sociétés, etc.), dès 2017. La France a par ailleurs signé d'autres accords (bilatéraux ou mutlilatéraux) d'échange de données fiscales.

  • Le "paquet optimisation fiscale" des députés PS :

Promesse partiellement tenuePour aller plus loin que le projet de loi du gouvernement, des députés PS ont déposé le 6 novembre 2013 des amendements au budget 2014, afin d'y intégrer de nouvelles mesures de lutte contre l'évasion fiscale. Ils visent notamment à :

  • Elargir la notion d'"abus de droit" pour faciliter le redressement des entreprises
  • Obliger les promoteurs ou utilisateurs de montages d’optimisation fiscale à les communiquer à l’administration fiscale avant leur mise en oeuvre
  • Mettre à disposition de l’administration fiscale de la comptabilité analytique et consolidée des plus grandes entreprises
  • Supprimer l’automaticité de la suspension de l’établissement de l’impôt pendant la procédure de contrôle
  • Limiter les prix de transfert (facturations des échanges avec ou entre filiales)

La plupart des amendements ont été votés par l'Assemblée le 15 novembre 2013.

A la suite des "Panama Papers"

En avril 2016, des médias du monde entier ont révélé, grâce à la fuite de 11,5 millions de documents d'un cabinet d'avocats panaméen, des informations sur les personnes ou entreprises ayant recours à l'évasion fiscale, via des sociétés offshores (implantées dans un paradis fiscal).

A la suite de ces révélations, le gouvernement a inscrit le 8 avril 2016 le Panama sur la liste des Etats et territoires non coopératifs en matière fiscale, dont il avait été retiré en 2012 par le gouvernement Fillon. Bercy a expliqué que le Panama ne transmettait "toujours pas à la France les renseignements nécessaires à l'application de sa législation".

Lors d'une interview sur France 2 le 14 avril 2016, François Hollande a annoncé une nouvelle réforme : "La troisième grande réforme à mener, c’est la transparence, la lutte contre la fraude fiscale. On est en plein dans l’actualité avec l’affaire 'Panama papers' ".

Les résultats

Les recettes

En juin 2016, le Service de Traitement des Déclarations Rectificatives, chargé de régulariser les repentis fiscaux, avait déjà reçu 45 000 demandes de régularisation, pour un bénéfice de 7 milliards d'euros nets pour l'Etat.

Les établissements bancaires

Un rapport publié en mars 2016 par des ONG a relevé que les banques françaises implantées dans les paradis fiscaux y réalisaient un tiers de leurs bénéfices. BNP Paribas, la Société générale, BPCE (Banque populaire-Caisse d’épargne), le Crédit agricole et le Crédit mutuel-CIC sont les banques qui profitent le plus de leurs implantations offshore. Depuis 2013, tous les établissement bancaires français qui réalisent des bénéfices à l'étranger sont tenus de mentionner les pays dans lesquels ils les réalisent. 
 

La colère des ONG

Le 15 décembre 2015, le gouvernement a bloqué en pleine nuit un amendement qui oblige les entreprises à rendre public, une fois par an, le montant de leur chiffre d'affaires, leur nombre d'employés, les profits réalisés et les impôts payés. Lesdites données fiscales seraient donc uniquement transmises à l'administration fiscale. Pas question donc de rendre publique les informations fiscales sur les turpitudes des grands groupes. "On n'est pas sûrs que tout ça tourne bien" déclare Christian Eckert, ministre du Budget, pour justifier la position du gouvernement.

La non-adoption de l'amendement suscite la fureur des ONG.

En marge de l'adoption au Sénat d'un projet de transparence fiscale pour les multinationales, le 26 janvier 2017, Le Revenu évaluait les impôts non payés par les grandes multinationales à 200 milliards d'euros par an.

Calendrier en retard

Le rejet du procureur financier par le Sénat a ajourné l'adoption définitive des projets de loi sur la transparence, de l'été 2013 au mois de novembre 2013.

Type de promesse : Projet présidentiel

Mots-clés : évasion fiscaleaffaire Cahuzacparadis fiscauxfraudeloi d'assainissement bancaire