Une taxation à 75 % pour les revenus supérieurs à 1 million d'euros

Promesse partiellement tenue

Promesse partiellement tenue de François Hollande

 

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La première mouture

Doutes et précisions

Le 19 juillet 2012, Jérôme Cahuzac a annoncé, conformément à une annonce de Michel Sapin, que la taxe à 75 % ne durerait que "le temps du désendettement".

Le 9 août 2012, le Conseil constitutionnel a menacé d'annuler cette disposition fiscale : sans dispositif de plafonnement, elle serait potentiellement "confiscatoire", et donc anticonstitutionnelle.

Un mois plus tard, François Hollande a balayé sur TF1 les rumeurs sur un éventuel recul sur la taxe à 75 % : d'une durée d'environ deux ans, la taxe ne souffrira "aucune exception" (même si les revenus du capital seront exonérés) et devrait concerner entre 2 000 et 3 000 personnes.

Adoption

Le 20 décembre 2012, le Parlement a adopté dans le cadre du budget 2013 la "contribution exceptionnelle de solidarité" à 75 % proposée par le gouvernement.

  • La mesure devait durer deux ans, pour les revenus 2012 et 2013.
  • Elle ne prenait pas en compte les revenus du capital.
  • Outre l'impôt sur le revenu, elle intègrait dans son assiette tous les autres impôts (CRDS, CSG...). Ce qui devait conduire, selon Les Echos, à un taux effectif proche de 67 %.

La mesure visait environ 1 500 personnes, qui devaient subir une hausse moyenne de 139 500 euros de leurs impôts, selon le rapporteur général du budget, Christian Eckert. 

Dans les faits, cette mesure devait se traduire par une majoration de 18 % de l'imposition des revenus au-delà d'un million d'euros : en effet, il faut soustraire aux 75 % les 45 % de l'impôt sur le revenu, les 8 % de prélèvements sociaux et les 4% de la contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus.

Censure

Le samedi 29 décembre 2012, le Conseil constitutionnel a censuré la taxe, au motif d'une "méconnaissance de l'égalité devant les charges publiques". La critique ne portait pas tant sur le montant que sur le mode de calcul de la taxe : elle était calculée par personne physique, alors que l'impôt sur le revenu est calculé par foyer.

Jean-Marc Ayrault a rapidement réagi en indiquant qu'un nouveau dispositif, conforme aux principes posés par le Conseil constitutionnel, « sera(it) présenté dans le cadre de la prochaine loi de finances ».

La deuxième mouture

Au fil des mois, les signaux contradictoires se sont multipliés. La taxe ne serait plus temporaire, mais appliquée pendant tout le quinquennat, voire "pérenne", a déclaré le ministre du Budget Jérôme Cahuzac, le 6 janvier 2013. Cinq jours plus tard, le ministre de l'Economie Pierre Moscovici l'a contredit, en précisant que la taxe serait bien temporaire, le temps d'un "effort exceptionnel" de redressement des comptes publics.

Pour préparer son nouveau texte, le gouvernement a saisi le 12 février 2013 le Conseil d'Etat. Son avis consultatif, divulgué le 21 mars, a enterré le principe d'une taxe à 75 %. Selon lui, pour être validée par le Conseil constutionnel, elle ne pourra pas dépasser un plafond de deux tiers (66,67 %) des revenus. Prélèvements sociaux exclus, la future taxe ne devrait donc pas dépasser les 60 %. En conséquence, la contribution additionnelle, initialement fixée à 18 %, s'élèverait à 4 %.

Pour contourner cette difficulté, François Hollande a annoncé le 28 mars 2013 que la nouvelle taxe serait payée directement par les entreprises qui versent des salaires supérieurs à 1 million d'euros par an, et non plus par les particuliers.

La deuxième mouture de la taxe a été adoptée définitivement dans le cadre du budget 2014, le 19 décembre 2013 :

  • Elle durera deux ans (revenus 2013 et 2014)
  • Elle sera payée par les quelque 470 entreprises qui versent des revenus supérieurs à un million d'euros. Celles-ci paieront une taxe exceptionnelle de 50 % sur la partie dépassant cette somme, en plus des charges sociales. 
  • Un plafonnement limitera le total du montant payé par les entreprises à 5 % de son chiffre d'affaires 

Le 29 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a validé la taxe.

La disparition au bout de deux ans

Le 6 septembre 2014, le premier ministre Manuel Valls a annoncé dans le journal sportif L'Equipe (les clubs de football français ayant été lourdement affectés par la contribution exceptionnelle) que la taxe n'existerait plus au 1er janvier 2015. Elle n'aura donc duré que deux ans (les exercices fiscaux 2013 et 2014), et non "le temps du désendettement", comme l'avaient annoncé Jérôme Cahuzac et Michel Sapin au début du quinquennat.

Selon des estimations (encore provisoires) des Echos, elle aura rapporté au total 420 millions d'euros en deux ans :

  • 260 millions d'euros en 2014, prélevés sur les revenus de 2013
  • 160 millions d'euros en 2015, prélevés sur les revenus de 2014

LCI a également avancé le chiffre de 420 millions d'euros, soulignant sa faiblesse par rapport aux 75 milliards d'euros de recettes générés par l'impôt sur le revenu.

Calendrier en retard

L'agenda du changement précisait que cette mesure devait figurer dans la loi de finances rectificative de juillet 2012. Or, la mesure n'a été mise en place que dans la loi de finances 2013. Censurée par le Conseil constitutionnel fin 2012, elle a finalement été réintégrée à la loi de finances 2014, votée fin 2013.

Type de promesse : Engagement oral de campagne

Mots-clés : fiscalitéimpôtstaxesrichesimpôt sur le revenuIRPPBudget 2013Conseil d'EtatBudget 2014Conseil constitutionnel